Faisons en sorte qu’allaitement et travail, ça marche !
Éditorial du n° 137 d’Allaiter aujourd’hui, octobre 2023.
La Semaine mondiale de l’allaitement 2023, dont le thème est la conciliation entre travail et allaitement et comment agir dans ce but nous permet de revenir sur cette problématique dont on ne parlera jamais assez.
En anglais, le thème s’intitule « Let’s make breastfeeding and work, work ! », soit : faisons en sorte qu’allaitement et travail, ça marche ! Avec un jeu de mots sur « work » que ne permet pas le français.
Car, comme il est dit sur le site de l’OMS [1], « vous ne devriez pas avoir besoin de super pouvoirs pour jongler entre l’allaitement et le travail ». Tout devrait être fait (par la législation, les institutions, les employeurs, les collègues, etc.) pour faciliter la chose.
Bien sûr, beaucoup de femmes françaises réussissent à poursuivre l’allaitement après la reprise du travail [2]. Mais combien se heurtent à différents obstacles au cours de leur périple, qui en devient un vrai parcours du combattant…
Il y a celles à qui on refuse les pauses allaitement pour tirer leur lait, celles qui n’ont pas d’endroit adéquat pour le faire, celles à qui on retire du salaire, celles qu’on oblige à récupérer le temps de tirage.
Il y a celles dont la crèche refuse le lait tiré, exige qu’il soit apporté congelé, jette le lait non utilisé et refuse de le redonner aux parents…
Il y a celles qui sont interdites d’allaitement dans les locaux de la crèche.
Un certain nombre de ces obstacles ne devraient pas exister puisqu’il existe des dispositions législatives et réglementaires (pauses allaitement, locaux dédiés à l’allaitement…) [3] Encore faudrait-il qu’elles soient connues et appliquées.
Il existe bien de-ci de-là des initiatives qui vont dans le bon sens [4], mais il faudrait une initiative au niveau national comme ce que proposait le rapport Turck de 2010 [5] qui demandait d’ »informer les employeurs publics et privés des avantages, pour eux-mêmes et leurs employées, de la poursuite de l’allaitement après la reprise du travail ; respecter les droits des femmes qui allaitent après la reprise du travail et garantir aux femmes qui optent pour un travail à temps partiel ou un congé parental la garantie de leur emploi et de leur projet de carrière professionnelle ; rendre obligatoire dans les structures d’accueil de nourrissons et de jeunes enfants et chez les assistantes maternelles l’application des recommandations de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) sur le recueil, le transport et la conservation du lait maternel ».
Treize ans plus tard, il serait temps de le ressortir des oubliettes où il est tombé. Et de s’inspirer de ce qui se fait dans d’autres pays. Comme par exemple au Mali, où la Direction nationale de la santé publique a envoyé début août, avec la Fondation Orange, des SMS disant aux mères d’amener leurs bébés là où elles travaillent, et aux responsables de services publics et privés d’aménager des espaces d’allaitement dans les lieux de travail.
[1] www.who.int/campaigns/world-breastfeeding-week/2023
[2] Voir les témoignages dans le hors-série d’Allaiter aujourd’hui, Allaiter et travailler, c’est possible !
[3] Pour en savoir plus, voir sur le site LLL la page Travail et allaitement, ce que dit la loi. Et pour le privé, l’article de l’avocate Marie Petit « L’entreprise et les salariées allaitantes, quels droits, quelles obligations ? ».
[4] Voir l’article paru le 29 juin dans Les Echos, « Salles réservées, fauteuil adapté : ces entreprises facilitent l’allaitement de leurs salariées ».
[5] https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_Plan_daction_allaitement_Pr_D_Turck.pdf