La Leche League, par les femmes, pour les femmes

La Leche League, par les femmes, pour les femmes

Grâce à un post Facebook, j’ai découvert récemment un article datant de 2014 paru dans la revue Spirale et traitant de l’allaitement long [1].

Il y aurait des choses à dire sur certains points de l’article, mais je voudrais en citer un passage que j’ai trouvé intéressant : « Élisabeth Badinter, dans son livre Le conflit, la femme et la mère, critique avec véhémence La Leche League et la Grande Tétée, parlant de prosélytisme, quasiment d’embrigadement collectif. Pourtant, elle raconte comment sont nées ces réunions de femmes allaitantes. Trois femmes dans un parc allaitent leurs enfants. D’autres femmes qui les observent de loin viennent leur dire qu’elles ont échoué dans leur allaitement et leur demandent conseil. L’échange s’installe, mais le temps presse et rendez-vous est pris pour continuer la conversation. Ces femmes vont se rencontrer régulièrement pour partager leurs expériences et ces réunions naissent. Élisabeth Badinter parle alors de prosélytisme, mais oublie de se poser la question de fond. Pourquoi ces femmes qui n’avaient pas allaité sont-elles allées voir les femmes allaitantes ? curiosité ? perplexité ? regret ? frustration ? En tout cas, mouvement de femmes vers des femmes, partage d’expérience de femmes […] Bien sûr, LLL a ses excès, voire ses outrances, comme tout mouvement militant. Il n’empêche qu’elle a permis la mise en place d’un esprit de compagnonnage, d’un transfert d’expérience que la transmission de mère à fille ne permettait plus. Elle a permis d’ouvrir les portes du huis clos que chaque mère vivait avec son bébé, et de proposer des appuis techniques pour aboutir à ce que les professionnels disaient depuis toujours, sans se préoccuper pourtant d’en donner tous les moyens possibles aux mères, “le meilleur lait pour le bébé est celui de sa mère”, et à ce que les femmes savaient au fond d’elles-mêmes, “l’accouchement finit la grossesse, l’allaitement suit la naissance”. Mais, entre les deux, existaient tous les écueils rédhibitoires. Écueils techniques : la médicalisation de la naissance (parfaitement nécessaire eu égard à la sécurisation souhaitable face à la mortalité infantile de l’époque). Écueils sociaux : l’image de la femme fortement façonnée par le féminisme d’après-guerre. »

On pourrait chipoter sur des détails (les femmes à l’origine de LLL étaient 7 et non 3 [2]). On pourrait discuter sur l’aspect « outrancier ». Mais globalement, je trouve que ce passage met vraiment bien en avant l’originalité et la nouveauté, toujours d’actualité, de l’apport de LLL : mouvement de femmes vers des femmes, partage d’expériences, compagnonnage, transfert d’expérience, transmission. Aujourd’hui, on parlerait aussi d’empowerment et on aurait bien raison.

Alors vive le compagnonnage LLL et longue vie au soutien de mère à mère [3] !

[1] Catherine Salinier-Rolland, L’allaitement long, Spirale 2014 ; 72(4) : 49-62, www.cairn.info/revue-spirale-2014-4-page-49.htm
[2] Pour en savoir plus, voir l’historique de LLL International sur le site de LLL France, https://www.lllfrance.org/nous-connaitre/historique-de-lll-international
[3] Un podcast à écouter sur LLL : S’informer, échanger, se soutenir (un beau programme !), https://www.lllfrance.org/vous-informer/actualites/2148-un-podcast-sur-lll-france

Éditorial du n° 125 d’Allaiter aujourd’hui, octobre 2020.

A propos de l'auteur

Claude Didierjean-Jouveau

Animatrice de La Leche League France, rédactrice en chef de la revue "Allaiter aujourd'hui !" Auteur de plusieurs ouvrages sur l'allaitement, la naissance et le maternage.

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