Le portage au quotidien
En Occident, le portage et le porte-bébé sont trop souvent confinés à certains lieux (l’extérieur de la maison) et certaines activités (courses, promenades…). Alors que c’est partout et tout le temps qu’on peut porter son enfant. Claudine raconte : « Ce qui m’a le plus surprise lors de mon voyage au Burkina, c’est que les bébés étaient portés tout le temps : sur le dos de leur mère et la mère sur la mobylette, quand elle pile la farine, quand elle danse… Elle ne se promène pas pour calmer le bébé (elle n’a pas le temps), c’est le bébé qui fait partie de sa vie et qui la partage. J’aurais envie de dire qu’elle s’habille avec son bébé. »
En ville
Il suffit d’avoir aidé une seule fois une jeune mère à porter sa poussette dans les escaliers du métro parisien pour comprendre l’intérêt d’utiliser un porte-bébé en ville.
Avec un porte-bébé, on va partout, on passe partout, les escaliers ne sont pas un problème, ni les portes étroites, ni les portes tournantes, ni les tourniquets du métro… Une jeune mère parisienne avait d’ailleurs organisé en septembre 2004 une action en direction de la RATP : 13 parents et 10 bébés et bambins s’étaient retrouvés dans le bus 92 et le métro. Des photos avaient été prises et envoyées à la RATP afin de la sensibiliser à l’intérêt du portage (par opposition aux poussettes encombrantes et peu maniables).
Comme l’explique une mère qui a « mis la poussette au placard » : « C’est bien plus agréable de se promener avec son bébé à sa hauteur et contre soi. Quant à la simplicité pour faire les courses, comparée au délicat exercice qui consiste à entasser le maximum de choses dans le hamac de la poussette en espérant que le bébé ne va pas se mettre à pleurer au milieu du supermarché, je n’en parle même pas… » (1)
Autre avantage : l’enfant porté étant « à hauteur d’homme », il n’est donc pas, contrairement à l’enfant en poussette, à hauteur… des pots d’échappement. Les spécialistes de la pollution de l’air dans les grandes villes conseillent d’ailleurs d’éviter de transporter les enfants dans des poussettes, et de plutôt les porter dans le dos ou sur le ventre… (2)
En balade
Là aussi, le porte-bébé permet d’aller partout avec le bébé, là où une poussette ne passerait jamais : chemins cahoteux, bourbeux… (3) Et il permet d’entreprendre de longues balades, que les petites jambes d’un bambin ne supporteraient pas. Comme le dit un proverbe africain : « Porté au dos, l’enfant ne connaît pas la longueur du chemin. »
Une mère raconte la facilité de randonner avec un bébé porté : « Lové sur le ventre de son papa, Tanguy a fait jusqu’à 6 heures de marche par jour, avec des dénivelés de 1 000 mètres. Nous l’habillions léger et complétions sa tenue par des chaussettes d’adulte en guise de guêtres, pour protéger ses jambes. Quant au soleil ou à la pluie, nous ne craignions ni l’un ni l’autre grâce au parapluie-soleil de golf que mon mari emportait accroché à son sac à dos. Pour les pauses, nous étalions une couverture de survie sous le parapluie-soleil, et posions Tanguy allongé dessus. »
À signaler qu’il faut prendre des précautions avec un bébé porté à la montagne dans un port-bébé dorsal. Les tout-petits peuvent y rester trop longtemps immobiles (surtout s’ils sont endormis), et souffrir de froid aux extrémités. Un médecin savoyard dit voir régulièrement des bébés qui souffrent d’engelures des orteils, des doigts ou des oreilles, car ils se sont endormis dans la poussette ou le porte-bébé dorsal pendant que leurs parents skiaient ou marchaient.
Que ce soit en ville, à la montagne ou à la campagne, si l’enfant est porté contre le corps du porteur, l’hiver nécessite un aménagement de l’habillement de ce dernier. Les Japonais ont inventé la Mama Coat (qu’on trouve sur Internet, de même que d’autres modèles de manteaux de portage), mais on peut très bien bricoler soi-même une veste ou un poncho qui laisse la place à un enfant porté devant ou derrière (4).
À la maison
L’utilisation du porte-bébé dans la maison est moins courante chez nous, alors qu’elle est vraiment la solution idéale pour répondre aux besoins du bébé les premiers mois, sans être coincé sans bouger sur le canapé (d’autant que les bébés aiment quand « ça bouge » !).
Certains parents disent en plaisantant que le seul endroit de la maison où ils ne portent pas leur bébé, c’est la douche. Eh bien, il existe maintenant des porte-bébés permettant de porter sous la douche ou dans la piscine (par exemple l’écharpe ByKay AquaCarrier).
À la crèche
Dans les lieux d’accueil des tout-petits, que ce soit en crèche, en halte-garderie ou chez une assistante maternelle, il n’y a généralement qu’un seul adulte pour plusieurs enfants. Et il est parfois bien difficile, voire impossible, de répondre à leurs besoins en même temps. Il semble que la seule solution soit alors de s’occuper d’un des enfants pendant que les autres attendent.
Mais le portage ne pourrait-il pas être une autre solution, beaucoup plus satisfaisante et respectueuse des besoins de l’enfant ? Sans compter tous les petits qui pleurent de manière inconsolable, n’arrivent pas à s’endormir… et s’apaiseraient sans doute, portés par l’adulte.
Certaines structures l’ont bien compris. C’est ainsi que la crèche lilloise À Petits Pas, malheureusement fermée depuis, a longtemps utilisé écharpes et Porte-CâLLLins. Les auxiliaires de puériculture trouvaient « magique » la façon dont le portage calmait et rassurait les tout-petits, tout en leur permettant de s’occuper des plus grands.
Une halte-garderie d’Illkirch, en Alsace, utilise elle aussi des Porte-CâLLLins, dans le même but : calmer les pleurs des tout-petits, combler leur besoin de portage, tout en pouvant faire autre chose. Le stress de la période d’adaptation en est bien diminué. S’il y a une demande croissante de la part des parents, on peut espérer que cette pratique s’étende rapidement à beaucoup d’autres crèches et haltes-garderies. Encore faudra-t-il vaincre les réticences et résistances de beaucoup de professionnel(le)s qui craignent la proximité corporelle avec l’enfant, et la dimension affective d’attachement qu’elle engendre.
À l’hôpital
On a vu l’intérêt du portage kangourou pour les bébés prématurés. Il s’agit là du portage par la mère ou un autre membre de la famille.
Mais on peut également imaginer que des membres du personnel portent ces bébés prématurés en l’absence des parents. Au début des années 1980, des essais, très concluants, avaient été faits avec des Snugli dans le service de néonatalogie de Port-Royal et à l’Institut de puériculture. De nos jours, certaines cliniques allemandes, de nombreux hôpitaux américains et quelques hôpitaux en Suisse et en Autriche utilisent un porte-bébé spécial prématuré (le Weego Preemie) qui peut servir pour des bébés pesant seulement 1 600 grammes. Dans le service de néonatologie de l’Hôpital universitaire de Cologne, en Allemagne, l’écharpe est utilisée aussi bien par le personnel que par les parents. En France même, certains services de néonatalogie (par exemple celui du CHU Nord de Marseille) pratiquent le portage. Dans les services de pédiatrie également, le personnel pourrait porter les enfants malades, notamment la nuit quand, souvent, les parents ne sont plus là.
(1) Voir le reportage photos sur les courses dans un hypermarché avec un bébé porté en écharpe à l’adresse :
http://perinatalite.chez.tiscali.fr/reportage-auchan/index.html
(2) Dans une interview donnée en 1999, le Pr Alain Grimfeld, chef du service de pneumologie de l’hôpital Armand-Trousseau à Paris, n’hésitait pas à déclarer : « Pour les petits, il serait bon d’éviter les poussettes en ville et de préférer, par exemple, “les sacs à dos” pour transporter les enfants. » D’après une étude faite en 2011 par l’Association Santé Environnement de France dans le centre d’Aix-en- Provence, les enfants en poussette inhaleraient entre deux et six fois la dose limite de particules fines fixée par l’OMS. Des microparticules qui seraient cancérigènes et source de nombreux problèmes de santé, dont l’asthme.
(3) Je me souviens d’une scène de cauchemar avec mon premier bébé. J’étais allée me promener dans un bois tout proche avec le landau. Il avait plu, la nuit allait
tomber, je peinais à pousser le landau dans les sentiers escarpés et glissants, je me suis complètement perdue, n’arrivant pas à retrouver la sortie et finissant par
embourber le landau dans un chantier de maisons en construction… Ce fut la dernière fois que je l’utilisai.
(4) Voir par exemple http://okaasan-leblog.com/2013/04/08/un-manteau-de-portage-home-made/
Extrait de Porter bébé : avantages et bienfaits, éditions Jouvence.