L’hypothèse de la grand-mère

L’hypothèse de la grand-mère

Chez pratiquement tous les mammifères, les femelles ne vivent pas au-delà de leur période féconde. Pourquoi est-ce différent chez les humains ? Pourquoi les femmes vivent-elles (de plus en plus) longtemps après qu’elles soient ménopausées et ne puissent plus avoir d’enfants ?
D’un strict point de vue évolutionniste, cela semble du gâchis !
Pour tenter de répondre à cette question, les sociobiologistes ont imaginé ce qu’ils appellent « l’hypothèse de la grand-mère » [1].
Pour eux, « la longue période de la post-ménopause est en fait partie intégrante du plan reproducteur de l’organisme humain » [2]. En effet, les femmes âgées influencent de manière positive le succès biologique de la famille, à travers notamment les soins donnés par la grand-mère à la progéniture de sa fille.
Comme le raconte Sarah Blaffer Hrdy, « supposons qu’il ait existé autrefois une collecteuse (de nourriture) dévouée avec un complément fortuit de gènes. Elle a réussi à vivre au-delà du moment où les ovaires des primates sont normalement épuisés. Parce qu’elle était une collecteuse efficace et déjà prédisposée à aider sa famille, elle a canalisé le surplus de nourriture vers ses petits-enfants récemment sevrés lorsque sa propre fille (ou peut-être la partenaire de son fils ou de son frère) avait un nouveau bébé. Ainsi, les gènes contribuant à la longévité, partagés par cette parenté, ont fini par être surreprésentés dans la succession des générations, menant à une lignée de femmes qui vivaient jusqu’à soixante ou soixante-dix ans » [3].
« L’archétype, ce sont les grands-mères des Hadza, groupe d’un millier de nomades du nord de la Tanzanie, qui vivent de chasse et de cueillette, tout comme nos ancêtres il y a environ un million d’années. Kristen Hawkes, anthropologue à l’Université de l’Utah, a découvert que les vieilles femmes Hazdas fournissaient bien plus de nourriture que la plupart des autres membres du groupe, ce qui la conduisit à penser que “l’hypothèse de la grand-mère nous permet d’envisager très différemment pourquoi les êtres humains modernes ont brusquement été capables d’aller partout et de tout faire”. » [4]

 

[1] Voir sur Wikipedia : Hypothèse de la grand-mère.
[2] Voir l’ouvrage passionnant de Sarah Blaffer Hrdy, Les instincts maternels, Payot, 2002.
[3] Ibid.
[4] Katherine Ellison, Le cerveau des mères, Marabout, 2008.

 

Extrait de Le (nouvel) art d’être grand-parent.

 

Un article (en anglais) sur le pourquoi de la ménopause chez les orques et sans doute aussi chez les êtres humains : What can killer whales teach us about the menopause ?

Et un en français : À qui profite la ménopause ? Et pourquoi n’existe-t-elle que chez l’humain et les baleines ?

About The Author

Claude Didierjean-Jouveau

Animatrice de La Leche League France, rédactrice en chef de la revue "Allaiter aujourd'hui !" Auteur de plusieurs ouvrages sur l'allaitement, la naissance et le maternage.

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